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Sauts en parachute pour les 100 ans des 24 heures du Mans

Un saut technique, une ambiance de folie, une préparation administrative pointue

Crédits images : Eurosport - Jean Simone - Automobile Club de l'Ouest

Dimanche 11 juin 2023, le public est nombreux pour regarder la cérémonie des podiums des 24 heures du Mans, que ce soit sur place ou en direct à la télévision. Surprise dans le ciel : trois parachutistes ont sauté et ils portent le drapeau national des trois premières écuries. Au moment où le porteur du drapeau italien se pose, célébrant la victoire de l’écurie Ferrari, les magnums sont ouverts et le champagne jaillit sur le podium !
Les images n'ont duré que quelques secondes, mais elles sont apparues pile au bon moment : la prestation est parfaitement réussie pour les parachutistes. Voici leur témoignage.

Témoignages de tous les membres du "staff technique parachutiste" : Candy, Christophe, Erich, Franck, Ingrid, José, Laurent, Loïc, Mario, Miguel, Mireille, Olivier et Phoumma.

Texte par S. Phoummavongsa "Phoumma"

Les festivités du Centenaire des 24 heures du Mans avaient été présentées par Stéphane Le Foll, le maire du Mans et président de Le Mans Métropole ainsi que son adjoint à la sécurité publique et la conseillère municipale déléguée au développement et à l’attractivité commerciale, Blandine Affagard : "Les 26 et 27 mai 1923 a eu lieu la première course d’endurance des 24 heures du Mans, faisant entrer définitivement la ville du Mans dans la grande histoire du sport automobile. C’est donc le centenaire d’un lien très étroit qui unit le territoire à la voiture que nous célébrons cette année. Le Mans est dans la course et fêtera dignement le Centenaire des 24 heures" avait souligné Stéphane Le Foll.

Crédit images : Automobile Club de l'Ouest

Après plus d’un an de contact : "Je vous demande d’atterrir dans une fenêtre de temps de 45 secondes, correspondant au moment où l’hymne national du vainqueur sera lancé et où les drapeaux des trois premières écuries seront hissés, pouvez-vous me réaliser cela ?"

Voilà résumé la commande de Pierrick Navarre, lancée 3 mois avant le jour J, et qui sera le fil guide inlassablement répété par son assistante, Axelle Larobe lors des réunions hebdomadaires de coordination.

Au final et simplement : le dimanche 11 juin, à 16h43 précisément, trois parachutistes, portant trois drapeaux sur la centaine possible, doivent apparaître dans le champ du podium, de manière synchronisée durant les 45 secondes que dure la cérémonie du podium pour la catégorie reine des 24 heures du Mans, ni plus, ni moins…

Au 21èmesiècle, pour le commun des mortels, absolument tout est maitrisable. Pas pour le parachutiste qui sait très bien que la météorologie et l’aérologie sont encore des sciences que l’homme ne maîtrise pas ou pas encore...

Le challenge technique est bien présent.

Illustration de l’effet final tel que recherché par les organisateurs : les trois drapeaux, portés par les parachutes, évoluent dans le champ de cadrage des caméras, le drapeau du vainqueur devant dominer dans le ciel. C'est ce qui a guidé les parachutistes dans leurs séances d’entrainement.

Un saut technique

Un saut hors aérodrome, ou plus communément appelé "saut de dém'" chez les pratiquants, n’est jamais facile pour le parachutiste qui le réalise, quel que soit son positionnement à la sortie de l’aéronef. Cela nécessite une bonne connaissance de ses capacités du moment, un matériel adapté à la prestation voulue et à son environnement, et surtout beaucoup d’humilité.

Parmi le vivier des parachutistes compétents et disponibles, le choix des parachutistes est rapidement arrêté. Ce sera (par ordre alphabétique) : Franck Chartrain, Mario Gervasi, Loïc Lubin et S. Phoummavongsa "Phoumma". Dans cette sélection est pris en compte celui qui sera désigné comme remplaçant… il y aura nécessairement un déçu, mais au regard de la prestation demandée et ici pour le Centenaire des 24 heures du Mans, il n’est pas possible de faire dans l’à peu près, il n’y a aucune place pour l’approximation. Sans se mettre de la pression, il faut être à la hauteur de l’évènement et de la confiance que l’ACO (Automobile Club de l'Ouest) nous a accordé. 31 nationalités présentes, les cas de doublon ou de triplon possible sur le podium… après un rapide calcul statistique et prise en compte des délais incompressibles, il s’avère que les paras n’ont que 5 minutes pour préparer les trois drapeaux des écuries qui seront sur les trois marches du podium.

Les parachutistes se tiennent prêts pour le saut de démonstration, de gauche à droite : Mario Gervasi, S. Phoummavongsa "Phoumma" et Franck Chartrain. Photo Jean Simone

Les paras

Après un brillant parcours de compétiteur national de plusieurs années dans la discipline de la précision d’atterrissage (équipe de PA de l’armée de l’air, pas encore de l’Espace à cette époque pas si lointaine…), Loïc a dû interrompre ses activités sportives suite à une reconversion professionnelle. Il a repris tranquillement le parachutisme en 2022.

Pour Franck, Mario et Phoumma, ce trinôme se retrouve très régulièrement. Franck et Phoumma s’affrontent régulièrement dans les compétitions de PA et/ou de VR et ce binôme réalise depuis longtemps des sauts hors aérodrome. Au sein de ce trinôme, techniquement, ils se connaissent très bien pour avoir réalisé ensemble et régulièrement des sauts assez exceptionnels depuis quelques années : 2017 pour le départ des 20 km de Paris au-dessus de la tour Eiffel, 2017 : toujours Paris avec un saut sur le mythique stade Charléty, saut sur Verdun lors du Raid de la Voie Sacrée en 2018, sans parler des autres sauts méconnus - car ils ne se sont pas déroulés pour des raisons météos - comme celui du château de Vincennes (atterrissage dans les jardins de la reine, au profit de la Fédération Nationale des Anciens Chasseurs [FNAC]). Aussi et plus récemment, les deux derniers sauts du Grand Prix d’Amérique, en janvier 2022 puis janvier 2023, et enfin du tout récent saut sur l’École Militaire, le 24 juin 2023, au profit de la Commission Armées-Jeunesse (voir encart en fin de cet article) devant un parterre d’autorités : le ministre de la défense, plusieurs secrétaires d’État, des hautes autorités civiles et les plus hautes autorités militaires des armées, directions et services du ministère des armées. Étaient présents le président de la FFP, Yves-Marie Guillaud, tout comme la générale de brigade Anne-Cécile Ortemann, présidente de la Fédération des Clubs de la Défense (FCD).

Plusieurs week-ends d’entrainement se sont déroulés au préalable sur le centre de parachutisme FFP de l’École de Parachutisme du Centre Orléans Loiret (EPCOL). Bernadette Rousseau et son staff technique nous facilitèrent les séquences d’entrainement, en coordination avec ses stages. L’effort a été fait sur le vol de patrouille qui nécessite des connaissances relevant plutôt du B3 (voile contact), sur le timing entre la sortie de l’aéronef, l’altitude de sortie, les différentes trajectoires/évolutions aériennes possibles et un atterrissage synchronisé, soit dans le même temps, soit à des intervalles de temps égaux.

Une préparation administrative pointue

Avant le jour du saut, 10 jours de festivités en cœur de ville et dans les quartiers : pavoisement, pauses musicales, courses et restitutions historiques investissent les rues et les places pendant toute la semaine du centenaire, dès le 3 juin et jusqu’à la course des 10 et 11 juin. "Les temps forts du circuit seront retransmis sur des écrans géants en cœur de ville dans une démarche participative et inclusive, pour ne priver personne des animations du circuit" précisait Blandine Affagard.

"Voler" dans une manifestation aérienne en même temps que la PAF, l’élite de l’aéronautique française, nous met au même niveau aux yeux des organisateurs et du public, c’est déjà une pression en soi. Le fait de savoir que cela le sera en mondovision en est une autre…

Le passage de la Patrouille de France, quelques minutes avant le départ mythique de cette édition du Centenaire des 24 heures du Mans. Photo Jean Simone

Réaliser un saut en parachute durant les 24 heures du Mans n’est pas une chose aisée, car la coordination avec les autres spectacles aériens est nécessaire. En plus des trois / quatre hélicoptères qui filment la course en permanence, pour le Centenaire, l’ACO a prévu plusieurs spectacles aériens publics durant les deux jours impliquant notamment les militaires : passage de la PAF avec un A400 M, de plusieurs Rafale, d’un NH 90 Caracal, une montgolfière "Of Course Le Mans/24 heures du Mans" place des Jacobins, de l’aérocordage et en final, le largage de trois parachutistes.

L’arrêté du 10 novembre 2021 relatif aux manifestations aériennes s’est substitué à l’arrêté du 4 avril 1996 à partir de la date du 21 avril 2022. Ce nouveau texte est certes applicable aux manifestations aériennes effectives à compter du 12 avril 2022, mais ce n’est pas si simple, car, dans le cadre des mesures transitoires, un certain nombre d’exceptions s’appliqueront seulement à compter du 1erjanvier 2024, notamment tout ce qui est lié à l’expérience minimale des directeurs des vols de spectacles aériens publics autres que simples, à l’expérience récente de ses directeurs des vols de spectacles aériens publics autres que simples, etc…

Bref, les dispositions du nouvel arrêté ne s’appliquent pas à toutes les manifestations aériennes débutant au plus tard le 11 avril 2022 y compris si ces mêmes manifestations aériennes se poursuivent le 12 avril 2022 ou au-delà… Il faut obligatoirement relire scrupuleusement les 42 pages écrites en taille 10… d’autant qu’il y a de nombreuses coordinations aéronautiques et qu’il faut respecter les inamovibles délais des demandes d’autorisation aéronautique…

Reconnaissance et mise en place

Résidant à Nice, Mario ne peut pas se déplacer aussi souvent que nécessaire, Phoumma le tourangeau étant le plus proche, ce dernier devient le correspondant technique privilégié pour réaliser toutes les reconnaissances techniques, géographiques et aérologiques du terrain. Trois reconnaissances seront nécessaires. La zone dédiée est scannée au millimètre près afin de tenter d’offrir une belle expérience, tant pour les spectateurs présents que pour les caméras de la mondovision. Choix du poser, étude de tous les sens du vent possibles, prise en compte du nouvel espace médicalisé avec héliport, du scénario de fin de course qui est millimétré à la demi-minute près, du positionnement des voitures encore sur la piste au moment où le drapeau à damier va s’abaisser devant le véhicule vainqueur, accès et vie du staff parachutiste pendant les deux jours, tout y passe. Avec l’ACO, rien n’est oublié… car les pass accordés donnent droit à quasiment toutes les zones… et surtout à la piste en elle-même, avant, pendant et après la course…

Attente dans l’hélicoptère : Mario Gervasi et S. Phoummavongsa "Phoumma", qui assure le contact radio. Photo Mario Gervasi

Les parachutistes ont sauté au-dessus du circuit ! Ils doivent assurer la précision dans le temps, et dans la courte fenêtre de 45 secondes, avant même d’assurer la précision d’atterrissage. Photo Jean Simone

La mise en place du staff parachutiste s’effectue dès le vendredi pour le premier tiers qui peut se libérer professionnellement parlant. Le second tiers arrive le samedi matin, et pour un tout petit dernier tiers, le dimanche matin 9h00 pour un saut qui se réalisera rappelons-le à 16h43…. Entre les contrôles des accès, l’immensité du terrain, les différentes actions à réaliser, ce n’est pas du flux tendu, mais il n’y aura pas de temps mort ou très peu, c’est une certitude. La grande majorité d’entre nous choisira de vivre "l’expérience des 24 heures du Mans" : les derniers tours du vendredi et/ou du samedi matin, aller sur les zones techniques, "les paddocks", à la rencontre des voitures, de leurs pilotes, des mécaniciens et des techniciens, on ressent les enjeux, la fierté de ces écuries d’avoir été qualifiées ou invitées, les vibrations des moteurs et la chaleur de la gomme des pneumatiques. L’ambiance des différentes équipes est très vite ressentie.

Parmi la liste des 62 écuries engagées, 16 hypercars, 24 LM P2, 21 LMGTE-Am et 1 "Innovative car". La prise en compte des huit écuries réservistes, car, peu de monde le sait, mais au-delà des 62 équipes/écuries officialisées, huit écuries se tiennent prêtes en cas de forfait ou de défection de dernière minute… encore des drapeaux à fabriquer et à préparer si elles devaient figurer sur le podium, car aux 24 heures du Mans, tout est possible jusqu’à la dernière minute de course…, une pointe de stress supplémentaire…comme si on en avait besoin, nous les paras… Mais ce facteur est rapidement pris en compte et intégré. Il devient finalement un élément des nombreuses check-list qui seront réalisées.

S. Phoummavongsa "Phoumma", porteur du drapeau américain, sous la voile de la Fédération des Clubs de la Défense. Photo Jean Simone

Parmi les 31 nationalités présentes et parmi les 186 pilotes qui se présentent sur la ligne de départ du Centenaire des 24 heures du Mans le 10 juin 2023, un lien s’établit facilement et naturellement avec la voiture numérotée 25 et la voiture 51…

La voiture numérotée 25 de l’écurie ORT BY TF : dans la catégorie LMGTE-Am, l’Aston Martin Vantage AMR de l’omanais Ahmad Al Harthy, de l’américain Michael Dinan et de l’irlandais Charlies Eastwood nous attire immédiatement, car des projets de Mario sont en cours et des échanges très amicaux et des photos seront réalisées avant et après la course.

Franck Chartrain, porteur du drapeau japonais, sous la voile Tégo. Photo Jean Simone

La voiture numérotée 51 de l’écurie Ferrari AF Corse : dans la catégorie hypercar, la Ferrari 499P des italiens Alessandro Pier Guidi et Antonio Giovinazzi et de l’anglais James Calado, car qui ne peut pas être séduit par le mythe de l’écurie Ferrari qui revient après plus de 53 ans d’absence pour simplement gagner ? La force et la résolution d’une team, nous ressentons tout cela à leurs contacts. Ces échanges deviendront très amicaux et très chaleureux lorsque nous les reverrons plus tard, après la course… qu’ils remporteront, lors de la troisième mi-temps à la Casa Ferrari jusque tard dans la soirée !

Mario Gervasi, porteur du drapeau vainqueur italien, sous la voile de la Banque Française Mutualiste. Photo Jean Simone

Un déroulement strictement conforme à la feuille de route prévue

Dans ce type de manifestation à envergure internationale, rien n’est laissé au hasard. Et il convient d’être scrupuleux.

Samedi 10 juin : Le matin, laisser arriver les personnels, leur faire découvrir l’environnement extraordinaire et incroyable des 24 heures du Mans. Visite des tribunes, des paddocks, des écuries, des différents sites pour les spectateurs et l’arrière-boutique, le "back office" de cette énorme machinerie.

16h : toute l’équipe se retrouve pour assister dans les 30 minutes au départ. Être tous ensemble au départ de la course, c’est un moment de cohésion extraordinaire. Les tribunes sont blindées, on ne voit qu’un peu. Nous sommes des gens de l’air, nous préférons repérer les bons endroits où nous verrons au mieux "nos coureurs", les autres gens de l’air, le passage de la PAF et l’aérocordage du 2èmeRiMa d’Auvours qui doit amener le drapeau français du départ. À eux le départ, à nous l’arrivée… Un passage PAF toujours aussi magique, une belle prestation du NH 90 dans son exercice d’aérocordage.

À 16h30 c’est le départ mythique de cette édition du Centenaire et, en quelques minutes, 3 minutes et 20 secondes environ (soit une moyenne proche des 250 km/h…), les premières voitures avalent le tracé de 13, 629 km, associant une partie du circuit Bugatti (4,185 km) à des routes départementales et se retrouvent de nouveau sur leurs lignes de départ. Le bruit des machines de course est indescriptible, chacun des moteurs a sa personnalité. Le ronronnement du moteur Nascar des US est reconnaissable d’entre tous, une sorte de force puissante et tranquille tel le puma. Le bruit d’une Ferrari se rapprocherait d’un miaulement de félin, guépard ou jaguar… pas étonnant, les deux animaux terrestres les plus rapides au monde…

Les captures d’image des caméras embarquées apportent une vue aérienne du circuit, avec la foule qui s'est agglutinée à l'arrivée. En bas à droite de l'image, on distingue le T d'atterrissage des parachutistes et légèrement au-dessus à droite, Franck Chartrain en courte finale avec le drapeau japonais.

17h30-19h00 : au PC du staff technique, briefing commun des différentes cellules composant le "staff technique para" et notamment : la cellule "zone de mise à terre" (ZMT) avec le DV (directeur des vols) Erich Nehls et l’ensemble de son équipe qui seront présents, sur la piste, lors de la préparation de la ZMT ; la cellule "Embarquement" avec Mireille qui devra gérer les nombreux drapeaux en liaison avec les trois paras devant l’hélicoptère ; la cellule "Liaison" avec Miguel qui donnera le top décollage et le top largage en liaison directe avec le central course des 24 heures ; etc… Dans chaque cellule, chacun sait ce qu’il doit faire : Candy, Ingrid, Christophe, José, Laurent, Olivier…

Les déplacements sur les différents sites (afin que chacun soit "aware" dirait Jean-Claude Vandame) sont complémentaires en cas de défaillance de l’un d'entre nous. Erich précise dans le détail ce qu’il attend de chacun de nous, sur la ZMT.

À ce moment-là, il est entériné le choix des sautants et le scénario final qui sera appliqué. Sans démériter, Loïc restera le remplaçant au pied levé jusqu’à la dernière minute, son parachute sera prêt jusqu’au décollage…

Cette capture d’image de la caméra embarquée de Mario Gervasi, avec le drapeau vainqueur italien qui flotte à ses pieds, permet de visualiser la zone d’atterrissage depuis le ciel, avec les véhicules de course qui ont été arrêtés avant d'atteindre le paddock, et la foule tout autour.

Fin de soirée à proximité du Mans, la journée est épuisante rien qu’à cause du bruit incessant des moteurs. Pour ceux qui dormiront sur place, bouchons auriculaires ou casques anti bruits obligatoires sous peine de devenir sourd et, dans une moindre mesure, de ne pas dormir…

Dimanche 11 juin :
10h00 : reconnaissance pour les derniers arrivés.
12h00-13h00 : dernier briefing et consignes du DV.
13h00 : repas léger pour tous, la pression monte tranquillement dans l’esprit de tous les participants.
14h00 : les paras commencent à se préparer et se vérifient mutuellement leurs équipements.
15h00 : les différentes cellules sont déjà à leurs points d’attente, les sautants rejoignent à pied le point de RDV pour s’échauffer. Le général adjoint de la zone de défense OUESTY, le général Guillaume Couëtoux et l’adjoint du DMD nous croisent et nous encouragent… c’est le premier commandant d’unité de Phoumma…
Perceptions des drapeaux et déplacement en véhicule avec Mireille pour l’héliport.
16h00 : il est déjà 16h00 et le temps semble s’accélérer. Préparations des paras, les dernières vérifications sur l’homme, préparation des trois drapeaux à 10 mn avant la fin de la course.
16h20 : la direction des courses parie sur le fait qu’il n’y ait pas d’accident de dernières minutes dans le classement. 15 autres drapeaux, dûment identifiés nous attendent alignées en rang d’oignon…
1erFerrari : Italie, 2èmeToyota : Japon, 3èmeCadillac : USA.

Les parachutistes évoluent sous voile, selon le plan établi. Photo Olivier Serreau

Cinquante-huit ans après le succès de la 250 LM et cinquante ans après sa dernière participation, Ferrari signerait un retour en maître dans la catégorie reine de l’endurance et inscrirait de nouveau son nom dans l’histoire de la course, qui plus est celle du Centenaire… Cela serait sa dixième victoire sur la classique mancelle après son premier succès en 1949 et son dernier en 1965…

Pour nous, le clin d’œil est vite trouvé dans la seule part de souplesse que nous avons : Mario Gervasi, c’est notre italien bien à nous. C’est évidemment notre italien d’origine et de cœur qui prendra le drapeau italien et qui représentera Ferrari ; qui mieux que lui pouvait représenter "La scuderia" ?

Phoumma ayant pris l’habitude de sauter avec le drapeau américain à de multiples occasions comme encore dernièrement, il est naturellement choisi par Cadillac !

Franck représentera donc Toyota avec le drapeau du pays du soleil levant, tout simplement !

Puis tout s’enchaîne très rapidement, la direction des courses nous ordonne un décollage anticipé de 20 mn sur le tempo initial. Heureusement, nous étions déjà prêts, mais cela signifie aucun temps mort et se mettre dans le saut tout de suite.

Vérifications entre nous, embarquement, le pilote est prompt à décoller à l’issue de sa check-list. Le briefing avec le pilote largueur de la société Héliberté avait été réalisé la veille, de manière très approfondie et pendant près d’une heure, avec tous les paras présents.

Dès notre décollage, après avoir dépassé la hauteur des tribunes officielles, nous nous apercevons que, comme le veut la tradition ici au Mans, dès le drapeau à damiers abaissé sur le vainqueur, la Ferrari n° 51, le public envahi la piste, nous l’avions presque oublié… Nous sommes assez impressionnés, cela nous donne l’impression d’être dans le film "World War Z" avec Brad Pitt lorsque des zombies envahissent tout… et nous pensons au DV et ses personnels qui doivent peut-être batailler pour préserver notre zone d’atterrissage…

Arrivés à 1200 mètres en moins de 5 mn, finalement, nous sommes mis en attente par la direction des courses. Nous en profitons avec le pilote pour déterminer avec une grande précision l’axe du vent et donc du largage à venir.

L’attente va durer 15 minutes environ. Au top, l’hélicoptère rejoint immédiatement l’axe prévu, tandis que Franck assure le point de largage, signale sa sortie imminente à 5 secondes et c’est parti, dans l’ordre, Franck, Phoumma, Mario.

Peu de vent, une tendance bien affichée, un saut presque idéal.

Atterrissage de S. Phoummavongsa "Phoumma", avec le drapeau américain. Photo Mireille Nechls

Sortie des drapeaux et Franck et Phoumma se binôment tout en s’étageant de Mario. La scuderia Ferrari a gagné la course, le drapeau italien doit donc dominer le ciel de manière affichée et dans le temps, jusqu’à l’atterrissage.

Voir la piste remplie de monde est une vision surprenante et inoubliable. Notre zone d’atterrissage ressemble à un ilot sans humain. Nous voyons distinctement la manche à air de la FFP (Fédération Française de Parachutisme) ainsi que le flag "Cypres" d’Airtec positionnés à deux endroits stratégiques de part et d’autre de la piste. Intégration des trois parachutistes en s’assurant d’être dans le champ de la caméra principale dédiée qui retransmet la séquence en mondovision, dans l’axe du podium. Un réflexe de sécurité : subrepticement et furtivement, nous prenons en compte très régulièrement les deux hélicoptères qui tournent autour de nous, pourtant à très bonne distance, et qui nous filment. Nous notons que de nombreuses voitures de course ont été stationnées juste avant notre petite zone d’atterrissage, n’ayant pas pu rejoindre les paddocks, sans doute à cause de la foule.

Image extraite du direct Eurosport : le drapeau du vainqueur italien domine dans le ciel. L’effet final recherché par les organisateurs a été obtenu ! Cliquer sur l’image pour accéder directement au replay Eurosport. © Eurosport

Image extraite du direct Eurosport : on distingue le drapeau italien, volant sous le parachute piloté par Mario Gervasi et parfaitement aligné dans l’axe de prise de vue des caméras, juste derrière les trois drapeaux de la tribune. Cliquer sur l’image pour accéder directement au replay Eurosport. © Eurosport

Atterrissage de Mario Gervasi avec le drapeau italien. Photo Jean Simone

L’atterrissage se passe de manière maitrisée par chacun de nous et sans problème. Le temps de saluer la foule tout autour de nous, de ramasser nos voiles et de rejoindre le point de regroupement dans un des coins de notre zone, les membres du staff technique para démontaient déjà les équipements. Le temps d’une photo tous ensemble et de se congratuler, il faut déjà quitter la piste. Axelle de l’ACO nous dit que nous avions 15 secondes de retard à l’atterrissage… nous pensons tous que la prestation a été réalisée d’une belle manière et dans les temps…

Tandis que le public commence à se disperser sur le circuit, le staff para libère la zone d’atterrissage et pose pour une dernière photo. Photo Olivier Serreau

Généralement, pour les manifestations aériennes, c’est après coup que nous réalisons que nous avons participé à une belle manip et que nous en tirons une grande satisfaction. Mais pour les 24 heures du Mans, cette sensation est immédiate et nous accompagne pendant toute sa réalisation dès sa préparation, quand on s’équipe pour les sautants, quand on met en place la zone pour le staff technique. C’est la magie des 24 heures du Mans, un lieu chargé d’une âme exceptionnelle… l’esprit d’équipe règne.

Épilogue

Cet esprit d’équipe va se libérer lors des différentes troisièmes mi-temps…

Tout le staff technique et les trois sautants, sont immédiatement invités dans les paddocks par l’équipe Ferrari et par l’équipe d’Oman. Shooting photo dans les paddocks avec les équipes et les pilotes, avec les trophées, les Italiens nous remercient d’avoir sauté avec le drapeau italien, l’écurie d’Oman nous remercie d’avoir mis sur nos combinaisons, en signe de clin d’œil, le drapeau omanais…

Les parachutistes posent avec le drapeau, en compagnie d’un membre de l’équipe Ferrari. Photo Jean Simone

Les parachutistes posent avec le trophée, en compagnie d’un membre de l’écurie Ferrari. Photo Jean Simone

Beaucoup plus tard, après s’être déséquipé, et avoir débriefé le saut, Mario nous guide jusqu’à la "casa Ferrari".  Une entrée discrète, car tout est "rosso" et nous sommes en bleu… mais immédiatement, l’un des responsables de l’écurie qui nous avait spécialement invités nous fait monter sur l’estrade et tous les Italiens présents nous ovationnent. Une phrase qui est répétée tant de fois et qui fait chavirer nos cœurs de latin et d’européen : "Forza Italia, Forza Ferrari !"

Jusque tard dans la nuit, nous participons à la liesse. Un grand merci à tous, car ici plus qu’ailleurs, c’est un véritable travail d’équipe, sautant et non sautant.

Photo Loïc Lubin

Saut sur l’École militaire, à Paris

Flash-back : À peine un mois avant ces sauts pour les 100 ans des 24 heures du Mans, le même trio parachutiste avait réussi une belle démonstration, un première sur Paris, organisée par la FCD (Fédération des clubs de la défense).

Le mercredi 24 mai à 20h40, c'est dans le cadre de la remise des prix armées-jeunesse par la CAJ (Commission armées-jeunesse), que Mario Gervasi, Sengsouvanh "Phoumma" Phoummavongsa et Franck Chartrain ont sauté avec brio, déployant chacun sous leur parachute un drapeau aux couleurs de ladite commission.

Photo Lucille Marion

Après avoir évolué dans le ciel de Paris, à la lumière du soir, ils ont atterri au sein de l’École militaire, devant un parterre d’autorités : le ministre de la Défense, plusieurs secrétaires d’État, des hautes autorités civiles et les plus hautes autorités militaires des armées, directions et services du ministère des armées.

Étaient présent(e)s également : la générale de brigade Anne-Cécile Ortemann, présidente de la Fédération des Clubs de la Défense (FCD), Yves-Marie Guillaud, président de la FFP et Marie-France Breguet-Collombet, présidente de la Ligue parachutiste Ile-de-France.

 

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À lire/voir également
Notre article sur la démonstration du Grand Prix d’Amérique en janvier 2023.
Plus de photos de Jean Simone : Lien vers sa page Instagram.

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