
Photo de droite : Neil Armstrong avec les Golden Knights après leur dernier saut victorieux des championnats du monde 1997, en Turquie (photo Golden Knights). À gauche : la célèbre photo des premières traces de pas de l'homme sur la Lune (Photo NASA).
À l'occasion du 56° anniversaire des premiers pas de l'homme sur la Lune, le 20 juillet 1969, et quelques jours après le saut très médiatisé de l’astronaute Thomas Pesquet (pour les cérémonies nationales du 14 juillet), ParaMag revient sur la (brève) carrière parachutiste de deux des astronautes de la mission Apollo 11.
Par Bruno Passe
"J’ai sauté deux fois, mais c’était sans le vouloir", avait confié Neil Armstrong au célèbre caméraman parachutiste Bruno Brokken, en 1997, en Turquie. La scène se passait durant les championnats du monde de parachutisme, organisés sur l’aéroport d’Efes.
L’un de ces deux sauts s’est produit en 1968, alors que Neil Armstrong s’entraînait pour la mission Apollo 11, qui allait bientôt faire entrer son équipage dans l’histoire en posant le pied sur la Lune. À la suite d’une défaillance survenue à très basse altitude, Armstrong a dû s’éjecter en urgence d’un module simulateur d’alunissage, juste avant que celui-ci ne s’écrase au sol et n’explose — comme le montre une image tirée d’un film 16 mm (voir ci-dessous). En tant que pilote, il était connu pour son sang-froid à toute épreuve.
Nous n’avons pas d’information sur le second saut de Neil Armstrong. Toutefois, lors de ces mêmes championnats en Turquie, il était présent officiellement et avait accompagné les parachutistes compétiteurs dans l’avion pour assister en direct à une manche de compétition.
Le regard d’un astronaute sur la victoire des Golden Knights
Neil Armstrong a ainsi assisté à la victoire de ses compatriotes : les Golden Knights, équipe nationale américaine. En 1997, il avait alors 67 ans. Depuis 1987, les Golden Knights avaient remporté tous les championnats du monde de vol relatif à 8, et en Turquie, ils décrochèrent leur sixième titre suprême.
L’équipe américaine affichait une moyenne de 22,4 points, et réalisa deux records du monde : 30 points à la manche n°4 et 31 points à la manche n°8.
Neil Armstrong ne fut présent qu’une journée, vers la fin de la compétition. Fidèle à son tempérament discret, il n’avait pas fait grand état de sa présence lors de cet événement de la FAI (Fédération aéronautique internationale).
Dans l’avion, avec Neil Armstrong
Le caméraman Bruno Brokken, présent pour un documentaire sur les championnats, fut chargé d’accompagner Neil Armstrong à bord du Cessna Caravan qui allait larguer des équipes de freefly.
"Il y avait du monde à l’embarquement", raconte Bruno. "Même si tout s’est fait discrètement, beaucoup avaient compris qu’Armstrong allait monter dans l’avion. À la demande du producteur, il a joué le jeu, ce qui était rare pour lui. Des parachutistes lui tendaient carnet de saut, stylo, casque... Certains avaient même récupéré des marqueurs effaçables, sans le savoir."

Bruno Brokken accompagne Neil Armstrong durant une descente en Caravan après le largage d’un groupe de compétiteurs aux championnats du monde 1997, en Turquie.
Bruno poursuit : "Juste avant l’embarquement, j’ai moi-même attrapé un marqueur, espérant obtenir un autographe sur mon casque. J’étais chargé de filmer Armstrong dans l’avion, et de redescendre avec lui après le largage. À la descente, je lui ai demandé s’il n’avait pas envie de sauter. Il m’a alors répondu : "J’ai déjà sauté deux fois, mais c’était sans le vouloir…"
Michael Collins, parachutiste sportif
L’autre astronaute d’Apollo 11 à avoir pratiqué le parachutisme fut Michael Collins, surtout connu pour être le "troisième homme" de la mission, resté en orbite pendant qu’Armstrong et Aldrin marchaient sur la Lune.
Avant cela, Michael Collins avait été pilote d’essai supersonique pour l’US Air Force, l’un des tout premiers astronautes, et le troisième Américain à avoir réalisé une sortie extravéhiculaire.
Mais contrairement à Armstrong, c'est volontairement que Collins a sauté en parachute. Plusieurs fois même, en chute libre, et en tant que parachutiste sportif.

Couverture et extrait du magazine Parachutist (publication officielle de l'USPA, la fédération parachutiste américaine) de mars 1982 dans lequel a été publié l'article de Bill Ottley. Sur la photo d'illustration, on voit l'astronaute Michael Collins (au centre) entouré de ses moniteurs Al King et Mike Johnston. Photos John Coffenn / Tampa Tribune (photo sol) et Bill Sutton (photo chute). Archives Guy Sauvage / ParaMag
Son premier saut : Zephyrhills, 1981
Dans le magazine Parachutist de mars 1982, Bill Ottley, alors directeur exécutif de l’USPA, raconte comment Collins s’est initié au parachutisme : "Le 19 octobre 1981, le lendemain de la fin des championnats du monde, Michael Collins — astronaute, diplomate, directeur de musée et auteur — est enfin devenu parachutiste."
Michael Collins était l’invité d’honneur du banquet de clôture du 4ᵉ championnat du monde de vol relatif, à Zephyrhills (Floride). En acceptant l’invitation, il avait précisé qu’il aimerait effectuer un saut durant son séjour.
La formation fut assurée par Al King, moniteur AFF, assisté de Mike Johnston. C’était une grande première :
● premier saut AFF pour une célébrité américaine,
● premier saut depuis un avion de type DC-3,
● premier saut à 13 000 pieds (environ 4 000 m) pour un élève AFF.
Un élève modèle
Selon Bill Ottley : "Collins était en excellente forme physique — il courait des marathons —, très à l’aise en vol, et curieux d’apprendre."
La NASA n’autorisait pas la pratique du parachutisme pour ses astronautes, et c'est en parachute ascensionnel qu'ils devaient se familiariser aux caractéristiques des parachutes.
À bord du DC-3, Michael Collins était accompagné de ses instructeurs, de plusieurs caméramans et membres de l’USPA. Une fois arrivé à l’altitude prévue, il s’est positionné à la porte, dos à l’extérieur. Une légère hésitation au départ a provoqué une petite rotation, mais le trio s’est rapidement stabilisé.
Pendant les 65 secondes de chute libre, Michael Collins a réalisé l’ensemble du programme : poignées témoins, exercices AFF, ouverture parfaite.
"L’atterrissage fut beaucoup plus doux que je ne l’imaginais", confiait-il peu après, entouré de journalistes.
Souhaitait-il recommencer ? "Bien sûr ! C’était très amusant et vraiment excitant." Et lorsqu’on lui demanda s’il voulait voir le film de son saut : "Bien sûr, j’en serais fier." La vidéo fut ensuite utilisée dans le programme de formation de l’USPA, comme exemple à suivre.
Épilogue
Neil Armstrong s’est éteint le 25 août 2012, à l’âge de 82 ans.
Michael Collins est décédé le 28 avril 2021, à l’âge de 91 ans.
Buzz Aldrin, dernier survivant d’Apollo 11, est toujours actif et partage régulièrement ses réflexions sur sa page Facebook :
facebook.com/buzzaldrin
À lire également
En 2012, suite au décès du premier homme à avoir marché sur la Lune, de nombreux médias lui ont rendu hommage. ParaMag en faisait partie avec un article intitulé "La visite de Neil Armstrong", par Patrick Passe, publié dans le n°305 d'octobre 2012.
Dans les années 1990, des événements aéronautiques importants furent souvent médiatisés en compagnie de Neil Armstrong. On le voit ici aux côtés de Felix Baumgartner, en juillet 2012, dans le contexte du projet Red Bull Stratos qui a abouti à un triple record du monde de saut en altitude, le 14 octobre 2012.
Felix Baumgartner est décédé accidentellement durant un vol en parapente, le 17 juillet 2025, au moment où nous rédigions ces lignes. Nous lui rendrons hommage dans un prochain article.