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CTN 2024 à Nantes (suite)

2° partie : Évolutions des brevets en chute et sous voile

Au cœur des débats de l'atelier "technique et DT", animé par Raphaël Plantin.

Nous l'avons vu en première partie de cet article sur le congrès technique national à Nantes : les travaux de l'atelier "technique et DT" et du "groupe de travail des DT" ont abouti sur des projets de modifications importantes dans les méthodes d'enseignement et les brevets fédéraux. L'objectif est la fidélisation des élèves. Les projets concernent plusieurs niveaux de pratique - débutants, intermédiaires, initiateurs et instructeurs – et ils sont présentées en détail dans cette deuxième partie.


Par Bruno Passe

"Le pire serait de ne rien faire" a commenté Olivier Métrot en présentant les résultats de l'expérimentation menée à Nancy en 2023. Quelques mots qui en disent long sur la situation actuelle, même si ce sujet de la fidélisation des élèves parachutistes est récurrent depuis des décennies.

Comme expliqué en première partie : les chiffres de l'activité sont en baisse, et il y a un gros souci en post PAC puisque beaucoup d'élèves ne poursuivent pas la pratique alors qu'ils ont réussi leur formation accompagnée en chute. Et il y a des projets de modifications à tous les étages de la progression.

Avant de développer, nous insistons sur le fait que, au moment où nous publions cet article, ces évolutions sont encore bel et bien à l'état de projets et de propositions. Nous y reviendrons en conclusion de cet article.

FIDÉLISATION DES ÉLÈVES ET PROJET DE MODIFICATIONS DE LA DT49

Évolution des brevets Bi4 et B4
Le constat est que les disciplines "trace" et "track" prennent de plus en plus d'importance dans la pratique. La proposition est donc faite de modifier les brevets Bi4 et B4.
Sur la demande du groupe de travail des DT, un collège d'experts a été sollicité pour structurer une proposition. Ce collège était piloté par Sébastien Chambet et Kevin Mansion.

Ci-dessus : Schéma 1

La proposition consiste à la mise en place de six modules (voir schéma 1 ci-dessus).
Les trois premiers modules (tête en haut, track ventre et track dos) seraient attachés au Bi4. Les trois modules suivants (tête en bas, trace ventre et trace dos) seraient attachés au B4. La trace ne serait accessible qu'à partir du moment où les deux modules track (ventre et dos) seraient validés.

Cette mise en place devrait rester flexible car il ne faut pas perdre de vue l'avantage des brevets de spécialité qui permettent aux pratiquants titulaires d'un même brevet de sauter entre eux. Et le Bi4 ouvre aussi l'accès à la compétition.

Un pratiquant qui ne souhaiterait pas faire de compétition pourrait donc suivre le cursus "track ventre" + "track dos" pour passer directement aux modules "trace".
Un pratiquant qui souhaiterait faire de la compétition devrait valider les deux modules "track" (ventre et dos), le module "tête en haut" et il obtiendrait le Bi4.
Le pratiquant qui validerait les six modules obtiendrait le B4.

La problématique qui est apparue à Nantes, et qui resterait à résoudre avant la mise en place de ces nouveaux modules, est que certains des Bi4 actuels ont peu de compétence en track dos. Il faudrait donc les identifier et en tenir compte. En dehors de cela, cette proposition a fait l'unanimité durant l'atelier "technique et DT" à Nantes.

Unanimité également en ce qui concerne la nécessité de faire apparaître les modules sur l'extranet de la FFP pour assurer le suivi plus facilement que sur le carnet de sauts, surtout lorsque les pratiquants changent de centre.

Afin que les initiateurs soient informés et à jour de ces nouveautés, une formation continue serait mise en place, possiblement sous forme de visioconférences.

En atelier, pour des débats interactifs avec les techniciens de terrain.

Évolutions du brevet A et du brevet B
Rappelons qu'un plan d'action a été décidé lors du CTN 2023, il a débuté par une expérimentation menée sur deux centres - Nancy et Pujaut - et il devrait aboutir sur une rénovation du brevet A et du brevet B qui passerait par une prochaine modification de la DT 49.

"Une de plus" diront certains. Et pourtant celle-ci est un des meilleurs exemples d'efficacité et de réactivité face à la demande du terrain.

En atelier, Olivier Métrot et Théo Verry ont présenté les bilans des expérimentations menées en 2023 sur leurs terrains respectifs : Nancy-Azelot et Avignon-Pujaut.
Luca Macaferri a également présenté un topo de l'expérimentation qui a été menée en parallèle à Chalon.

Dans le cadre de ces expérimentations, ils avaient une dérogation leur permettant de sortir un peu du cadre réglementaire actuel en tenant compte des constats qui émanent du terrain :
● La progression des élèves, telle qu'elle est enseignée à ce jour, est basée sur l'acquisition de savoir-faire qui permettent l'accessibilité aux techniques de loisir et de compétition (brevets B1, B2, B3, Bi4, B4, Bi5, B5).
● Le parcours pédagogique actuel souffre d'une certaine ancienneté :
- Solitude de l'élève du brevet A vers la fin du B,
- Des défauts de positions qui s'ancrent durablement,
- Un effet peu ludique à un moment de la progression,
- Une réalité loin de l'imaginaire du rêve de voler à plusieurs,
- Une complexité accrue lors des passages de brevet (B2 et Bi4),
- un problème structurel dans la composition des brevets, qui n'est pas toujours respectée, par exemple les deux exercices consécutifs réussis (figures du brevet B)
- un problème organisationnel car le staff des moniteurs manque de disponibilité et les élèves restent à l'écart.
- Lorsque la solitude se prolonge, elle est néfaste à la fidélisation, voire à la sécurité.

La cohérence des figures associées en tant qu'attendu et comme double critère de validation (2 exercices consécutifs imposés) a été remise en cause dans les expérimentations. Même si cela reste un outil pédagogique, le constat a été fait l'an dernier que certains s'affranchissent de ce critère pour coller à la demande du terrain.

La question budgétaire a volontairement été mise de coté pour se consacrer à la technique. À Nancy comme à Pujaut, le surcoût généré par la mise en place des sauts accompagnés (moniteurs et/ou initiateurs) supplémentaires n'a pas posé de problème. Les nouveaux pratiquants avaient le choix entre la méthode "standard" et la méthode expérimentale, et ils ont choisi en grande majorité la nouveauté, qui leur apparaissait aussi plus ludique.

Quoiqu'il en soit, dans le contexte associatif, cette question budgétaire et le surcoût généré pourrait être en partie résolue par l'utilisation des subventions comme celles de l'ANS, par exemple.

La problématique de la fidélisation a été résolue dans les trois expérimentations (la grande majorité des élèves continue à pratiquer), mais cela peut s'expliquer par l'émulation qu'elles ont généré.

Ci-dessus : Schéma 2

La proposition établie à Nantes, en présence de 27 directeurs techniques, 16 directeurs techniques adjoints, trois présidents ou dirigeants et un pilote, représentant 39 structures, consiste à la mise en place de nouveaux attendus pour le brevet A et le brevet B (voir schéma 2 ci-dessus).

La demande du terrain s'oriente surtout sur une validation des compétences et non plus sur des minimas, mais une hypothèse de minimas est tout de même avancée : brevet A à 12 chutes, brevet B à 20 chutes.

Les échanges avec les structures ont fait aussi apparaître :
● des notions de compétence (chute) et d'expérience (sous voile), "ne pas aller trop vite ",
● la nécessité d'imposer cinq sauts non suivi en vidéo après la PAC (sauts solo) pour une question d'autonomie.

Le projet du nouveau brevet B dit "version 2.0" ou "B rénové" se base sur un module général :
● L'élève serait titulaire du brevet A et aurait fait preuve d'une certaine autonomie validée par le DT.
● Il travaillerait en chute accompagné d'un initiateur VR (pour la chute à plat) et d'un initiateur Bi4/B4 (pour le autres positions).
● Les exercices accompagnés* seraient :
- Les différentes sorties d'avion,
- Les déplacement à plat (niveau du B2 actuel),
- La dérive efficace,
- L'initiation à la track (type Bi4 actuel),
- La chute autre qu'à plat face sol,
- La gestion des séparations et hauteurs,
- Le suivi sous voile.
(* Des initiateurs B2/Bi4/B4 encadreraient et suivraient l'élève, mais des exercices pourraient également être demandés sans que l'élève soit accompagné)

Ci-dessus : Schéma 3

Une fois obtenu le brevet B dit "version 2.0", la progression se synthétiserait selon le schéma 3 ci-dessus.

Revenons plus en détails sur les retours terrains provenant des expérimentations.
Olivier Métrot : "À Nancy, les élèves avaient le choix entre la progression actuelle et la progression expérimentale, sachant qu'il y avait un surcout à cause des sauts accompagnés.
La grande majorité a préféré la nouvelle méthode expérimentale.
Les initiateurs B2 qui ont ensuite pris en charge les élèves ont constatés qu'ils avaient moins de défauts de position et qu'ils étaient plus affutés sur les notions de dérives et de séparation.
Nous avons du mettre en place d'une fiche de validation de compétence afin de faciliter le passage d'un moniteur à un autre ou d'un initiateur à un autre.
L'expérimentation a reçu une adhésion totale : ça a fonctionné à Nancy, mais ça consomme beaucoup d'encadrement, ce n'est pas une surprise. Tous les élèves ont trouvé cette formule ludique et attractive, et tous sont allés dans la foulée vers le B2 ou le Bi4."

De gauche à droite : Franck Cotigny, Olivier Métrot et Théo Verry présentent les retours terrains provenant des expérimentations.

Théo Verry : "À Pujaut, l'expérimentation sur le brevet A+, c'est comme cela que nous l'avons appelé chez nous, a été une réussite à 100 %. …/….
Pour le brevet B+, nous avons constaté, comme pour Nancy, que c'est en quelque sorte l'antichambre du B2 et Bi4/B4.
Donc, au saut numéro 6, nous avons programmé des tours sur le dos avec transition pas demi tonneau ou demi loop. Le niveau de réussite était laissé à l'appréciation du moniteur.
À partie de 30 sauts, ceux qui avaient obtenu le B+ pouvaient sauter entre eux.
…/….
Comme nous étions dans un cadre expérimental, nous n'avons impliqué que des moniteurs. Mais après un an d'expérience, nous avons constaté que ça peut très bien fonctionner avec des initiateurs.
Dans l'ensemble, nos élèves étaient très fans de ce système : ils venaient nous voir, ils étaient demandeurs. L'expérimentation a provoqué beaucoup d'émulation sur la DZ.
Ça a cassé la timidité de certaines personnes et les pratiquant allaient les uns vers les autres.
Sur le plan de la technicité et de la sécurité nous n'avons eu aucun problème, on a même trouvé que les élèves étaient plus performants. Ce qui est peut-être normal puisqu'ils étaient plus encadrés."

UTILISATION DES VOILES PRINCIPALES ET PROJET DE MODIFICATION DE LA DT 48
Le tableau de limitation des tailles de voiles fonctionne bien et répond aux attentes de la DTN depuis sa mise en place en 2016.
Le constat du terrain est qu'il apparaît un peu trop restrictif en ce qui concerne l'accès aux voilures tri-cellulaires, après les 1000 sauts et les blocs de 400 sauts, pour pouvoir évoluer en taille de voile réduite. La proposition du groupe de travail, grâce au recul du temps, est d'adoucir un peu cette restriction par des blocs de 200 sauts. Ce qui amènerait l'accès à la voile tri-cellulaires à 1600 sauts, au lieu des 2000 sauts actuellement, toujours avec l'autorisation d'un DT et d’un initiateur Bi5 ou B5, suite à une formation spécifique.
Cette proposition a été validée le 8 février 2024 par le conseil d'administration de la FFP et mise en application dès le 9 février par une modification de la DT 48 : "L’utilisation de voilures individuelles tri-cellulaires et mixtes bi-cellulaires/tri-cellulaires n'est autorisée qu'à partir de 1600 sauts et avec l'autorisation d'un DT et d’un initiateur Bi5 ou B5, suite à une formation spécifique."

Cliquer sur l'image ci-dessus pour télécharger la nouvelle DT 48.

Autre proposition du groupe de travail : ouvrir la fourchette basse du tableau, fourchette qui est située entre 60 kg et 110 kg, afin d'être plus en accord avec la réalité du terrain. En effet, la première taille proposée par le tableau pour un poids de 60 kg est une voile de 175 pieds-carrés, mais cette taille n'existe pas sur le marché et il faut donc placer l'élève sous une 190 pieds-carrés.

Le groupe de travail s'est intéressé également à la formation des initiateurs Bi5 (pilotage sous voile), dont il apparaît nécessaire de relancer la dynamique. La proposition consisterait à la mise en place d'un stage, chapeauté par la FFP, et dispensant une formation dont les exigences seraient moins orientées vers la performance, et davantage vers la pratique de terrain. Si la proposition est validée par la DTN, dès 2024, un appel à candidatures serait lancé auprès des structures agrées.

LOGICIEL DE QCM
La mise en place du logiciel de QCM a été effective en 2024, c'était une demande du groupe de travail et c'est un gros chantier effectué par la FFP. L'outil est désormais accessible à tous les adhérents, que ce soit pour un passage de brevet ou pour se maintenir à niveau.
C'est un excellent outil car il offre un suivi en temps réel, un archivage informatique et de l'autonomie pour les moniteurs qui déterminent leurs propres minimas.
En plus il est évolutif en temps réel et participatif pour les moniteurs qui peuvent demander à le faire évoluer : fini les QCM imprimé non modifiables.

Cliquer sur l'image ci-dessus pour accéder aux QCM sur le site de la FFP.

FORMATION CONTINUE DES INITIATEURS
Déjà amorcée pour les initiateurs freefly dans le projet d'évolution des brevets Bi4 et B4 (voir précédemment), le sujet de la formation pourrait concerner aussi le vol relatif. Il serait bon de rassembler les initiateurs pour faire un point sur ce qu'ils pratiquent eux sur leur terrain, sur les pratiques modernes actuelles, sur les disciplines de compétition, sur les possibilités de subvention, de détection, etc.

EN CONCLUSION
C'est Raphaël Plantin qui a mené les travaux en atelier le vendredi puis qui les a synthétisés pour les présenter sous forme de proposition en plénière le samedi. Il a été très vivement applaudi par la salle, pour son travail, des applaudissements largement mérités.

À Nantes, au sujet de la DT 49, la DTN (direction technique nationale) a parlé de "faire des évolutions sans révolution, afin de laisser le temps aux centres de s'adapter". Son souhait est de "faire évoluer cette DT 49 en deux temps, pour ne pas faire un grand écart, et y aller progressivement avec une première évolution cette année sur les contenus de certains brevets, sur certains minimas en nombre de sauts, et refaire le point l'an prochain".

Les autres propositions ont été également bien accueillies par la DTN, en tant que projets. Pour toutes les modifications des méthodes d'enseignements et des directives techniques, le processus se déroule ainsi :
● Durant le CTN, comme nous l'avons vu dans cet article, les délibérations de l'atelier "technique et DT", basées sur les élaborations du "groupe de travail des DT", aboutissent sur des propositions concrètes qui sont présentées à la DTN.
● La DTN planche ensuite sur le sujet afin de déterminer les modifications possibles tout en tenant compte de la législation, notamment le Code du sport.
● Une fois ces modifications concrétisées dans le contenu des directives techniques concernées, elles sont soumises à l'approbation du conseil d'administration de la fédération.

Si tout se passe bien, les premières évolutions, dont certaines préfigurent dans cet article, devraient apparaître prochainement à travers de nouveaux textes et seront mises en application dès 2024 sur les terrains. C’est déjà le cas pour la directive technique n°48.

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