Lundi 9 décembre sur TF1, la scène d'ouverture du dernier épisode de la série "Cat’s Eyes" était une belle séquence en chute libre. Rien d'extravagant, pas de saut sans parachute, ni de bagarre en chute libre ou d'ouverture basse, c'était un saut en tandem de nuit (un peu d'extra-ordinaire tout de même) avec deux des sœurs Cat’s Eyes partant au secours de la troisième. Du parachutisme tandem en prime time sur TF1, signé Cat's Eyes, ça se laisse regarder et ça reste une bonne promotion pour l'activité. ParaMag vous emmène dans les coulisses du tournage.
Par Bruno Passe, interview d'Yves Négrié
La série-fiction avec Camille Lou, Constance Labbé et Claire Romain est adaptée du manga de Tsukasa Hōjō, rendu célèbre par le dessin animé des années 1980. Son dénouement, dans un huitième et dernier épisode, était très attendu par son public, sur TF1.
Un des parachutistes qui a participé au tournage de la séquence en chute libre ayant eu la bonne idée de nous prévenir avant sa diffusion, on ne voulait pas rater cette opportunité et nous l'avions annoncée le jour même sur ParaMag. C'est toujours sympa d'informer les lecteurs, car (pour celles et ceux qui étaient abonné(e)s à la version papier) souvent on nous disait : "Ah c'est dommage, on a raté la diffusion en prime time".
De plus, la séquence en chute libre arrive immédiatement en ouverture de l'épisode, avant même le générique. Fan ou pas fan de la série, c'était assez facile de la voir à la télévision.
Les fans les plus observateurs pouvaient se douter de l'arrivée d'une telle séquence, quelques images de parachutisme étant visibles furtivement dans la bande-annonce et dans certains extraits diffusés en avant-première par des émissions de télévision.
Et maintenant qu'on a vu la séquence, et que vous pouvez la voir ou la revoir sur TF1+ et bientôt sur Amazon Prime, nous avons eu envie de dévoiler les coulisses du tournage para. Il a eu lieu sur un centre proche de Paris, avec des parachutistes de Paris, Lyon et Chalon.
C'est possible grâce à Yves Négrié, qui était un des cameramen en chute et aussi conseiller technique para sur le tournage. Pour ceux qui ne le connaissent pas, Yves est un ancien athlète de haut niveau et membre des équipes de France de vol relatif à 8, multi médaillé, moniteur en chute et actuellement dirigeant de la soufflerie Anti-Gravity, le seul simulateur de chute libre de Seine-et-Marne, situé sur l'aérodrome de Melun-Villaroche.
Nous avons interviewé Yves pour qu'il nous raconte comment a été tournée cette séquence d'ouverture où une des trois sœurs Cat’s Eyes emmenait l'autre en tandem, pour aller délivrer la troisième qui était séquestrée dans un château.
ParaMag : Alors, est-ce que Constance Labbé, qui joue le rôle de Sylia, a sauté en tandem pour ce tournage ?
Yves Négrié : Non, elle a été doublée, la production n'a voulu prendre aucun risque, même si c'était pour le dernier épisode (rires…).
ParaMag : Qui sont les doublures para ?
La monitrice tandem est Julie Faivre, monitrice à Lyon-Corbas, et la passagère est Camille Négrié, ma fille. C'était marrant, car Camille n'avait jamais manifesté l'envie de sauter, alors qu'elle a 50 heures de soufflerie, mais là elle est devenue très motivée. Du coup, maintenant elle veut faire une formation PAC !
Excellente nouvelle ! Mais pour ces sauts de tournage, on imagine qu'il y avait tout de même des contraintes ?
Oui, à la base, la production voulait impérativement des doublures féminines, car elles devaient être équipées des combinaisons Cat's Eyes originales. En plus des combinaisons, les doublures étaient cagoulées, équipées de casques intégraux et d'un porte-bazooka pour la passagère.
En dehors de cela, c'était techniquement assez simple, il y avait une position de dérive à prendre en chute libre, car les Cat's Eyes visent le château dans lequel elles doivent pénétrer. Bon, avec le RSE (ralentisseur-stabilisateur-extracteur) obligatoire sur un tandem, ça ne dérive pas fort, mais les spectateurs ne le savent pas et le rendu à l'écran fonctionne bien.
La partie sous voile est composée uniquement d'images de synthèse, nous n'avons pas eu à produire d'image pour ça.
Quel était ton rôle dans le tournage et y avait-il d'autres parachutistes ?
J'étais caméraman en chute avec Pierre (Titou) Auvray. (N.D.L.R. : Pour ceux qui ne le connaissent pas, Pierre-Titou Auvray est un ancien athlète de haut niveau et membre des équipes de France de vol relatif à 8, multi médaillé, moniteur en chute et actuellement dirigeant de la soufflerie Sky Circus, le seul simulateur de chute libre en Bourgogne Franche-Comté, situé sur l'aérodrome de Chalon-sur-Saone).
Et j'ai été sollicité aussi en tant que conseiller technique pour la deuxième partie du tournage, au sol.
Nous en reparlerons, mais terminons-en avec le tournage parachutiste, c'était où ?
C'était à Saint-Florentin, chez Paris Jump, au mois de mars 2024. Nous avons sauté avec leur nouveau Cessna Caravan, qui venait juste d'arriver. Nous étions accompagnés d'une bonne petite équipe de production, car il y avait de la préparation à assurer. Déjà avec le début de la scène qui se passe dans l'avion, en lumière de nuit, pour l'accrochage des harnais, puis avec la mise en place à la porte, etc.
Et pour la partie en chute, ça s'est passé comment ?
La scène se déroule en pleine nuit, mais nous l'avons tournée de jour, en mode "nuit américaine". Donc il ne fallait jamais avoir le soleil dans le cadre et, pour les besoins du scénario, il fallait aussi des nuages. On avait donc un travail de cadrage et de positionnement à faire avec Titou, bien sûr on ne devait pas se filmer mutuellement. Pour les nuages, on a eu la chance d'avoir juste ce qu'il nous fallait et nous devions aussi obtenir une bonne sortie de champ, au moment de l'ouverture du parachute.
Il y a eu une bonne préparation en amont et les prises de vues ont été réalisées en seulement deux sauts. Sur place, je n'étais pas très satisfait de nos images, mais le travail de postproduction a été super et je trouve que le résultat à l'écran est top.
Effectivement ! Peux-tu nous parler du tournage de la partie sol ?
Après leur atterrissage, les deux sœurs Chamade, Sylia et Tamara (jouée par Camille Lou), se disputent. Car en guise d'atterrissage, c'est plutôt un mini crash à travers le toit du château. Cela fait partie de l'histoire, les deux sœurs traversent le toit du château, et elles se retrouvent accrochées dans leur harnais à quelques centimètres du sol. Et Sylia, en position passagère, se met à engueuler Tamara, en position pilote. Pour cette scène très spécifique, les actrices Camille Lou et Constance Labbé étaient doublées pas de vraies cascadeuses.
Et c'est là où tu es intervenu en tant que conseiller technique ?
C'est ça, je me suis donc retrouvé dans ce fameux château du Val-d'Oise, qui est régulièrement utilisé pour des tournages de ce genre. (N.D.L.R. : Le château de Dampont, à Us, a servi de lieu de tournage pour la série "Cat's Eyes", mais pas que : il a également été utilisé, par exemple, pour le film "Les Week-ends maléfiques du Comte Zaroff", en 1976, et pour "L’Autre Dumas" en 2010, et plus récemment (2019) pour la série "Joséphine, ange gardien" ou encore pour la série Marie Antoinette, en 2022.)
J'ai été impressionné par la production sur place, il y avait une centaine de personnes dans ce château et l'équipe de Cat's Eyes y a passé huit semaines au total.
Pour la scène de l'arrivée en parachute, cela nous a pris deux jours. Il y avait un système d'accrochage/libération accroché au plafond et sur lequel venait se connecter le harnais du parachute tandem. Il fallait tout rééquiper après chaque libération, puis rééquiper les actrices lorsque les prises de vue avec les doublures étaient terminées, etc. Et j'étais présent pour expliquer comment ça fonctionne, un harnais de parachute tandem, et m'assurer que tout était bien en place à chaque fois.
C'est bien lorsqu'une production soigne les détails comme ça. Du coup la scène de libération du harnais est réaliste et ça évite de voir des sangles ou des élévateurs mal positionnés, ou pas d'élévateurs du tout, comme on peut voir dans certains films de cinéma !
C'est une scène très soignée et j'ai adoré y participer.■