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Le jugement en P.A. : parfois de longues heures à cuire au soleil.
Le jugement des compétitions P.A. ne consiste pas à attendre et regarder les compétiteurs arriver sur la cible, il y a toute une logistique à mettre en place et à entretenir.
Pascale Dumarcet (juge et compétitrice en P.A.) et Frédy Goguet (responsable vidéo F.F.P.).
Le jugement des disciplines en chute exige parfois de rester plus de 12 heures, dans la pénombre et la chaleur des salles de jugement.
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Mais cela ne concerne pas la majorité des juges, direz-vous ! Ne croyez pas que nos collègues attendent béatement les beaux jours. Nous avons tous cassettes, ou DVD dans chacune de nos spécialités. Il est rare qu’un juge passe une semaine sans visionner des sauts. Pour "garder les yeux", mais aussi pour comprendre des constructions de figures, apprécier des angles, assimiler des mouvements, apprendre à anticiper. Avec la révision des règlements, c’est à un entraînement continu, que se soumettent les juges. Ceci est sanctionné par des contrôles réguliers, des stages de recyclage, des évaluations, théoriques ou pratiques. Grâce à ce travail de qualité, les juges français sont appréciés. En témoignent des invitations en Allemagne, Colombie, Espagne, Grande-Bretagne, Italie, Norvège, Slovénie, etc. La préparation des compétitions est importante. Elle se fait en collaboration avec l’organisateur. Pour ceux dont on connaît la compétence, cela se résume par un contact entre chef juge et directeur de l’épreuve. Pour d’autres, notre collaboration est plus intime : ils ont besoin de notre expérience pour les aider. Il y a aussi ceux qui voulant bien faire, s’organisent sans prendre en compte nos impératifs. Cela conduit à des situations délicates dont nous nous passerions volontiers. Tout est maintenant en place pour la première compétition. Le matériel est installé, essayé, le training des juges a eu lieu. Les ouvreurs atterrissent, les copies de sauts arrivent. Nous devons être concentrés sur notre travail jusqu’à l’issue du jugement. Ce sont de longues heures à cuire au soleil ou à rester plus de 12 heures, parfois, dans la pénombre et la chaleur des salles de jugement. Il faut faire abstraction du bruit, de l’inconfort, des repas pris sur le pouce, de l’attente des compétiteurs, ou des horaires incongrus, pour juger les performances, avec la même équité. Nous jugeons des performances et non des compétiteurs. Nous considérons et respectons autant les prouesses d’un compétiteur débutant que celles d’un champion multi-médaillé. Les juges, entraînés et qualifiés n’en sont pas moins des hommes. Ils peuvent aussi commettre des erreurs. Mais des règles comme le jugement majoritaire ou l’élimination des extrêmes en gomment un maximum. Nous avons, parfois, devant un évènement ou une circonstance particulière, à prendre une décision rapide. Ce sera toujours en s’appuyant sur les règlements, sans parti pris, et dans le sens de l’intérêt général. Il arrive que nous ayons à subir le mécontentement de tel ou tel. Contester un jugement avec véhémence reste pour nous un réel manque de respect envers les juges, et démontre une méconnaissance des techniques de jugement. Nous ne nous substituons pas à un entraîneur pour dire à un athlète ce qu’il doit faire pour améliorer sa performance ! Nous n’en avons ni les compétences, ni le talent. Nous aimerions simplement qu’en toutes circonstances la réciproque soit vraie. Mais ces cas sont vraiment exceptionnels. La majorité des compétitions se déroule sans anicroche, saut par saut, manche par manche. Les juges mesurent, notent, valident les points. C’est à la fin de la compétition que tout se bouscule. Les officiels veulent voir des sauts ; il y en a peu, ou plus. Qu’attend-on ? Les juges ! Pourquoi ? C’est simple ! Les voltiges se jugent presque en temps réel ; ce n’est pas le cas pour les autres disciplines. Pour juger un saut, il faut de 3 à 6 minutes Les avions, eux, vont beaucoup plus vite que les juges. Points, notes, classements sont maintenant vérifiés, et contrôlés. L’organisateur peut publier le palmarès, remettre trophées et récompenses puis ouvrir la table du vin d’honneur. Il transmettra les résultats à la Fédération et le chef juge aura à rédiger son compte-rendu. Le jugement nécessite un important matériel. Le plus visible est autour de la cible, avec aussi le système vidéo-sol. Ces équipements sont onéreux et fragiles. La mise en œuvre nécessite une grande attention. Le reste du matériel est constitué d’ordinateurs portables. Des étudiants, bordelais puis parisiens, développent les logiciels adéquats, basés sur les règlements F.A.I. et un cahier des charges de 2006 rédigé par une commission de la C.I.P. Deux de nos collègues se sont investis dans ces travaux en y apportant leurs compétences de juges. Ce système est utilisé chez nous pour les compétitions artistiques, et depuis 2007 pour celles de vol relatif. Il était cette année au championnat national allemand. Le but est de créer un système de jugement informatique des disciplines artistiques et du vol relatif, puis du voile contact et enfin de la voltige, sans matériel spécifique, d’un emploi convivial. Il sera mis, gratuitement, à la disposition de la communauté parachutiste. Sa présentation lors de la réunion annuelle de la CIP, fin janvier à Paris, fut un succès. Tous ceux, juges pour la plupart, qui ont participé aux démonstrations ont été étonnés et séduits. Les juges officient aussi lors des tentatives de records. Cela permet de découvrir, en détail, la rigueur, le sérieux, la précision nécessaires à la réussite de telles organisations. Ce fut par exemple le cas pour l’Eurorecord de freefly, record de freefly en grande formation réalisé à Ampuria en 2007. Il nous faut connaître les procédures associées à ce genre d’exercice. Les épreuves hexagonales se sont maintenant achevées. Les épreuves internationales les relaient : Croatie, Russie et Australie. Retenus par la C.I.P., nous retrouvons sur place nos collègues étrangers. Nous disposons de 2 ou 3 jours pour peaufiner notre entraînement, notre mise en place au sein de l’organisation, la préparation des briefings ou la gestion de l’imprévu. Nous allons vivre pendant deux semaines en semi-autarcie. Pendant ce temps, les compétiteurs, que nous retrouvons avec plaisir, terminent leur entraînement. Le travail est intense, entrecoupé parfois de longues attentes. Quand l’organisation est au top, cela est simple. Lorsque ce n’est pas le cas, la connaissance que nous avons les uns des autres, l’habitude de travailler ensemble, sont des gages d’harmonie au sein des juges et dans le jugement. Côtoyer le très haut niveau est pour certains une surprise. Nos athlètes étant souvent des leaders de ce très haut niveau, pour nous, la surprise est moindre. Ces compétitions servent aussi à étalonner le travail réalisé par les juges fédéraux. Nos repères, dans toutes les disciplines, permettent d’affirmer que les juges français sont performants. Les notes finales de 3 équipes françaises, sur le même podium du championnat du Monde 2004, ne différant que de quelques dixièmes de point, de celles du championnat de France, en sont un bel exemple. Tous les protagonistes d’une compétition ont à apprendre les uns des autres. Transmettre la passion du jugement et nos compétences à ceux qui souhaiteraient nous rejoindre est important pour nous. Bénévoles, nous demandons peu ; la reconnaissance pour ce que nous faisons, une médaille parfois ! Nos plus grandes récompenses viennent des compétiteurs. Comment rester insensible aux moments de suspense, de joie et d’intenses émotions qu’ils nous procurent. Dans le soleil couchant, une Marseillaise, saluée par trois drapeaux tricolores, ne peut pas laisser indifférent.
De retour vers Paris, baigné par l’aube naissante, l’Airbus glisse paisiblement vers la piste de Roissy. Derniers instants où l’esprit vagabonde au gré des moments forts de cette saison. Dans quelques instants, ce sera l’excitation du débarquement et de la correspondance. Depuis quelques semaines, nous connaissons le calendrier 2008 ; le cycle recommence
Bernard Garsault
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