Il y a un peu plus dun an, dans une de ses dernières apparitions à la télévision, Patrick de Gayardon répondait à un journaliste qui lui demandait a quoi servaient les «wing suits « (combinaisons à ailes) :
«Je pense quune nouvelle discipline va voir le jour prochainement. Bientôt des parachutistes qui nont que 200 sauts pourront essayer les ailes...»
Même si nous nen sommes pas encore là, le chemin semble tout tracé, notamment grâce aux évolutions mises au point par Loïc Jean-Albert et Pierre Desmet, dont nous avions déjà présenté le modèle dans notre édition de janvier dernier. Grâce à cette interview, vous allez constater quil sagit plus dune aile que dune combinaison, doù le titre de cet article...
P r o p o s r e c u e i l l i s p a r B r u n o P a s s e, le 13/05/99
P h o t o s : P i e r r e D e s m e t
Loïc est tombé dans la marmite alors quil était tout petit : fils de Françoise et Michel Jean-Albert, D.T. à la Réunion, il a grandi dans le parachutisme. Il vient de terminer la PAC de son frère Franck. Actuellement membre de léquipe de France de VR-8, il est également moniteur breveté détat, P.A.C. et tandem. De passage à Tallard ou à la Réunion, vous avez des chances de voir Loïc, entre 2 sauts déquipe, de tandem ou de freefly, sauter avec son pote Pierre Desmet, tous 2 équipés dune façon bizarre...
Que ce soit après un vol de groupe ou une longue trajectoire autour dun énorme nuage, les images vidéos quils ramènent de là-haut sont fabuleuses. En plus douvrir une nouvelle forme de vol, le wing flight est aussi un jeu qui se joue à plusieurs. Loïc nous explique ici son concept daile-combinaison et la
technique appropriée.
ParaMag : Avant daborder laspect technique de laile-combinaison, explique-nous à quoi elle vous sert.
Loïc Jean-Albert : Avec Pierre, nous totalisons une soixantaine de sauts ensemble, chacun équipé de ce modèle. Cela comprend également une dizaine de sauts avec Francis Heilmann, qui utilise une wing suit similaire à celle de Patrick de Gayardon (photo ci-contre, Loïc est en violet, Francis en orange). Je pense que notre aile-combinaison offre les mêmes possibilités que les modèles déjà connus (sauter dans les reliefs par exemple) mais nous sommes plus intéressés par les vols de groupe et cest ce que nous pratiquons le plus actuellement.
ParaMag : En quoi consistent ces sauts de groupe ?
Loïc Jean-Albert : Laile offre beaucoup de puissance sur les déplacements horizontaux et verticaux. On vole à 2 ou à 3 sur de longues trajectoires en enchaînant des biplans, des rotations sur laxe horizontal, des croisements (un peu comme en freefly), des courses ou de grandes courbes autour des nuages : tu vois une volute et tu peux foncer dedans à lhorizontale !
ParaMag : Une sorte de course de dérive améliorée...?
Loïc Jean-Albert : Par rapport à une dérive normale, tu nes pas handicapé dans tes mouvements : tu nes ni figé dans ta position, ni gêné par la combinaison qui apporte une marge de manoeuvre singulière, surtout en taux de chute. Tout en maintenant une trajectoire intéressante, tu conserves une marge vers le haut et vers le bas bien plus grande quavec une simple position de dérive. De plus la dépression nest pas verticale, ce qui rend possible les vols dessus-dessous à 1 mètre lun de lautre, en enroulant les trajectoires. En vol dos la combinaison porte moins, mais ça vole toujours, on peut donc évoluer face à face. Et bien sûr on peut sapponter, sortir accroché en biplan face à face ou dans le même sens ; on a même essayé en accordéon pour bien sentir la poussée dans la rotation...
ParaMag : A quelles vitesses évoluez-vous ?
Loïc Jean-Albert : On na pas encore fait de mesures précises et de plus nous ne sommes jamais à fond durant les sauts de groupe. Mais jestime le taux de chute moyen à environ 80 km/h. Sur un saut à 2, en partant à 3 500 mètres, nous avons été chronométrés à 2 minutes 10 en ouvrant à 800 mètres, le temps de chute est donc plus que doublé. Je pense que nous sommes à 2 de finesse, mais ça reste à vérifier précisément.
Daprès les sauts que nous avons fait avec Francis, je pense que notre modèle porte plus que celui de Deug, car la surface est plus importante, laile de jambe descend jusquà la cheville. De plus le parachute est déjà bien englobé dans la combinaison car celle-ci se gonfle légèrement au niveau du sac, formant une sorte de déflecteur naturel.
ParaMag : Pourquoi avoir choisi un concept «mono bloc» ? Comment test venue cette idée ?
Loïc Jean-Albert : Jétais plieur de Deug au moment où il sentraînait pour rentrer dans le Pilatus à Chambéry. Je lai vu passer des soirées entières à travailler sur la machine à coudre pour trouver le bon réglage de ses ailes de bras sur la combinaison. Je me suis dit quen passant directement le bras dans laile, ça serait certainement plus simple à fabriquer. Et cest parti comme ça !
Il ne sagit pas dune
combinaison sur laquelle on pose des ailes, mais carrément dune grande aile dans laquelle le chuteur sinstalle. Il y a donc moins de problèmes de placement et de réglage des ailes sur le corps de la combinaison. Avec notre concept, on peut tout de même jouer sur ce calage en modifiant la forme de base ; par contre, une fois que la combinaison est faite, on ne peut plus le modifier. Laile-combinaison est dotée de deux libérateurs pour les ailes de bras, commandés par une seule poignée de libération velcrotée sur la poitrine, ce qui permet une libération rapide et symétrique comme sur un skysurf, avec seulement trente centimètres de jonc à tirer. Contrairement à la combinaison de Deug, on na pas mis de dégagement par zipper sur le haut des bras et on libère les ailes à chaque saut.
Le sac et la partie supérieure du harnais (jusquaux poignées) sont à lextérieur de laile-combinaison, les cuissardes sont à lintérieur.
ParaMag : Quelles sont les consignes particulières au niveau de la sécurité ?
Loïc Jean-Albert : Évidemment la séparation, nest pas un problème si on compare à ce qui se fait en vol relatif ou en freefly : avec lhabitude, on peut se séparer à 100 mètres au-dessus de laltitude douverture. Mais pour les premiers sauts avec laile, il vaut mieux ouvrir au-dessus de 1 200 mètres par sécurité. Ensuite, avec lhabitude, la hauteur douverture normale de 900 mètres est suffisante.
Par contre le matériel doit être adapté. Nous utilisons des drisses de longueur standard mais nos extracteurs sont plus gros que la taille normale car la vitesse sur trajectoire est plus faible quen chute, et donc ça ne tire pas très fort. Avec ma voile habituelle (Stiletto 120), les ouvertures étaient longues et assez malsaines (twists et ouvertures en rotation).
Avec une voile de 190 pieds carrés, cest mieux, louverture est plus rapide et dans laxe ; ça donne également plus de temps pour réagir en cas dincident. Il faut éviter les extracteurs avec rétraction élastique et nutiliser que le hand deploy de type fond de sac.
Attention aux altimètres sonores : certains modèles considèrent la vitesse verticale comme insuffisante pour une vitesse de chute et donc ne sonnent pas. Il est aussi à noter quétant donné que cette vitesse est de lordre de 25 mètres par seconde, le Cypres ne déclenche pas..../...
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