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FREE FLY FESTIVAL 98


Le troisième Free Fly Festival s'est déroulé à Eloy (Arizona, U.S.A.) du 23 au 29 novembre dernier. Depuis sa création il y a trois ans, le nombre de participants y est en constante évolution, y compris chez les Français.


Par "Seb"

C'est au cours de l'année 1996 que naquit l'idée de rassembler les meilleurs free flyers du moment en laissant libre cours à leur imagination et à celle du king, Olav Zipser. Il avait accumulé depuis le début des années 1990 plusieurs milliers de sauts à explorer les pistes sans fin de la chute libre. Le but était simple : montrer au reste du monde ce qu'il était possible de faire grâce à la maîtrise des techniques du free fly. Charles Bryan, qui faisait alors partie de la mythique équipe des Free Fly Clowns (voir ParaMag n°107, avril 96), monta le projet. Il trouva le budget nécessaire pour permettre à une équipe de dix sylphes de faire, ensemble, 100 sauts en une semaine. Le centre d'Eloy en Arizona fut mis à contribution et accueillit ce qui allait devenir un événement historique du parachutisme moderne : le premier Free Fly Festival. Il eut lieu au mois de novembre 1996 (voir ParaMag n° 115, décembre 96).

Pour un festival ce fut un festival, l'entente entre ces dix paras, taillés dans la chair et dans la plume, tourna à l'osmose parfaite. La vidéo «Chronicle II», qui est aux free flyers ce que les films de Carl Boenish sont aux BASE jumpers, en est le témoin indélébile. La plupart des combinaisons qui furent alors réalisées, carvings, spins, courses de pylônes, transitions, sorties et mouvements en tous genres demeurent d'actualité ; c'est dire si ces paras étaient en avance sur leur temps.

Depuis 1996, le Free Fly Festival s'est pérennisé pour devenir une sorte de boogie ouvert aux free flyers de tous bords. Le niveau requis est cependant assez élevé et ceux qui souhaitent rentrer dans des sauts à nombreux ou difficiles techniquement doivent, comme en VR, faire la preuve qu'ils méritent leur place et la confiance de leurs partenaires.

Cette année ce sont près de 170 free flyers, venus du Japon, d'Australie, d'Europe, d'Amérique du nord et du sud qui se sont réunis en Arizona du 23 au 29 novembre dernier. Pour l'occasion une dizaine «d'organisateurs» avaient été invités, avec pour mission de s'amuser autant que les membres de leur groupe. De fait, chacun pouvait aller d'un groupe à un autre, en toute liberté et dans une excellente ambiance. Les participants pouvaient sauter alternativement avec tous les grands noms de la chute Rock & Roll : les Fly Boys, le surdoué Mike Vail, Charles Bryan, John Alaska ou Omar Alhegelan, le maître de la chute debout...

Les Français sont venus en nombre

Mais, dès le début de la semaine un groupe a imprimé un ton particulier à l'événement ; celui des Français venus en nombre cette année. Constitué pour l'essentiel du Team Parachutes de France (Stéphane Fardel, Sylvain Turina, Nicolas Arnaud, Pierre Maarek, Patrick Bernard, Arnaud Fletcher et FX Kesler), il a spontanément intégré quelques Australiens, Américains et d'autres Européens pour tourner en permanence entre 8 et 23 personnes. Il faut souligner que beaucoup d'autres Français y auraient eu leur place. En reconstituant le noyau dur qui avait eu l'occasion de se connaître lors des boogies organisés à Vichy, les Français ont réalisé des sauts de grande qualité et c'est toujours avec attention que leurs vidéos étaient observées dans la salle de pliage au milieu de laquelle trônait un écran géant.

Mais, plus que celle des Français en général, c'est surtout la présence de Stéphane Fardel et de Sylvain Turina qui a marqué le Festival 98. Libérés de toutes leurs entraves, les deux compères de Babylon ont pu exprimer créativité et talent en faisant voler les tubes et la «bombe» !!! Du jamais vu sur le centre d'Eloy pourtant habitué à voir tomber du ciel télévisions, voitures ou motos. Le succès était tel que Sylvain et Stéphane ont été contraints d'augmenter la taille des groupes pour répondre aux sollicitations toujours plus insistantes des parachutistes qui ne voulaient pas manquer l'occasion de participer à ces sauts si peu ordinaires...

A chaque appel du «bomb load» ou d'un «tube jump» par le manifest, l'excitation et la curiosité étaient palpables et chacun inspectait son appareil photo ou sa caméra vidéo avec fébrilité pour être sûr de saisir un peu de chute et de lumière.

Des «tubes» et des «bombes»

Comme l'avait justement remarqué l'excellent free flyer suisse Tazio Madlinger dans un article publié dans le magazine Slider, l'histoire du free fly est intimement liée à l'utilisation de la vidéo. De ce point de vue les sauts de bombes et de tubes ont consacré un bien beau mariage. Imaginez le spectacle du largage à 4 500, d'un fût d'une quarantaine de kilos, surmonté d'une sorte de manche à air multicolore de cinq mètres, filant ses bons 280 km/h dans le ciel écarlate d'Arizona, poursuivi par 23 parachutistes qui se rassemblent rapidement autour de l'engin pour former une ronde quasi parfaite. Du coin de l'oeil vous pouvez apercevoir Omar dans sa position debout caractéristique, jouer avec son ombre sur le tube de la bombe pendant que Mike Vail quitte son grip pour aller saisir l'engin à deux mains avant de partir en piqué pour signaler la fin du saut : mystique !

De très beaux sauts «no contact» avec 2 ou 3 tubes autour desquels volaient parfaitement plus de 20 personnes ont également été réalisés, mais le plus beau, le plus dynamique des sauts de tubes fut sans conteste celui effectué à dix, avec deux tubes écartés d'environ cinq mètres, autour desquels les Free flyers tournaient dans un carving endiablé en forme de 8... Très chauds les croisements ! Avoir la chance de participer à ces sauts fait mesurer à quel point le parachutisme peut être extraordinaire, intense, à l'image de ces regards, de ces poignées de mains échangés au sol où tous les participants se rassemblaient dans un rituel fraternel, les mains encore tremblantes de la décharge d'adrénaline procurée par des flares sans fin permis par l'air sec et immobile du désert d'Arizona.

Beaucoup d'autres types de sauts ont été effectués, comme par exemple quelques tentatives de «grandes» formations en chute debout, des sauts de dérives en formation ou des «high-speed» à 10 dont la durée n'excédait pas les 30 secondes. Tous les soirs était également organisée une course de dérive depuis le DC-3. Autant de diversité dans les sauts a permis à tous les participants de constater que la chute est une science autant qu'un art et qu'il faudrait beaucoup plus d'une vie pour en connaître tous les secrets, dont chaque discipline détient une part.

Le niveau moyen est en train d'exploser

De fait, plus le free fly mûrit, plus les free flyers constatent qu'il n'existe pas de discipline du parachutisme qui ne puisse leur apporter quelque chose et vice versa. Telle est par exemple la conviction du champion Nicolas Arnaud qui a bien compris la quintessence qu'il pouvait tirer du «Free Fly Style». Il fait déjà partie des grands du free fly. De la même façon l'observation du VR peut apporter beaucoup au free fly tant les règles de vol semblent transposables. Un spécialiste du VR aurait d'ailleurs été le bien venu pour préparer les sorties de Twin à 23 encore imparfaites pour permettre de réussir le saut à 43 réalisé sans beaucoup de succès en fin de semaine.

Finalement le Festival 98 fut une belle promesse pour les années à venir. Grâce aux écoles qui se sont mises en place un peu partout, le niveau moyen est en train d'exploser. D'un festival à l'autre, de boogie en boogie, les sauts sont de plus en plus grands, de plus en plus intéressants. Certains free flyers de tout juste 400 sauts, qui ont su investir dans quelques sauts de formation pour se forger une bonne base de progression, tiennent leur place dans des groupes importants, savent prendre des grips en douceur et respectent les procédures de séparation en piqué propre à la discipline.

Vivement l'année prochaine où le Festival de Charles Bryan devrait se tenir en septembre, chez lui, près du lac Tahoe en Californie où il vient de créer avec son inséparable pote Mike Vail, une drop zone entièrement dédiée au free fly. D'ici là, il ne fait aucun doute que nous aurons encore l'occasion de partager de magnifiques moments sur les boogies Européens, venez nous y rejoindre.



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